Cette magnifique statuette en marbre, datée de la première moitié du XIVe siècle, provenant de Florence est à rapprocher d’un groupe de suiveurs du sculpteur toscan Arnolfo di Cambio.
L’oeuvre montre un homme, debout, reposant sur une base sculptée. Sa tête est large et ronde. Ses cheveux, courts, laissent voir des traces de trépans dans ses mèches. Son visage, quelque peu effacé, à cause de l’érosion naturelle, montre des yeux vifs, un nez plat et une bouche entrouverte. Sa tête est légèrement tournée vers la droite.
Il porte des vêtements amples, aux plis lourds. Sa main droite retient son manteau. Dans la main gauche, il tient un parchemin enroulé, l’identifiant comme un prophète.
Ses genoux sculptés apparaissent sous l’épais tissu, et viennent rompre la rigidité formelle de la sculpture. Ses pieds sont chaussés par des sandales ouvertes.
On remarque la présence de deux trous sculptés : un dans le dos de la statue, l’autre sur la base, entre les deux pieds.
Le trou situé à la base de la sculpture sert à son maintien, quant à l’orifice situé à l’arrière il avait pour fonction d’accrocher la sculpture par l’arrière, afin d’éviter qu’elle tombe ou bascule.
Les caractéristiques formelles et stylistiques de cette oeuvre possèdent plusieurs similarités avec six autres statuettes visibles au Musée dell’Opera del Duomo à Florence. Ces six statuettes, datées du premier quart du XIVe siècle et réalisées par des adeptes d’Arnolfo di Cambio, étaient placées à l’origine dans les embrasures de la porte majeure de la façade gothique de la Cathédrale Santa Maria del Fiore.
L’ensemble des statues conservées à Florence et celle de notre Prophète possèdent plusieurs ressemblances qu’il est nécessaire d’aborder.
D’abord, les dimensions et les proportions corporelles des figures sont identiques. On retrouve ensuite la largeur de la tête, les épaules tombantes, les plis lourds des drapés, les jambes courtes, les doigts allongés ainsi que les sandales ouvertes. Dans certaines d’entre elles on observe une tentative de contrapposto par le genou saillant, et enfin, on remarque la présence d’un fût sculpté, partant de la base et rejoignant la statue, agissant comme un support de fixation. Bien que ce fût n’est pas retrouvé sur la statue du prophète, sa trace est bien présente dans le trou apparaissant entre ses pieds.
Le style de ces statuettes est à rapprocher, dans une certaine mesure, des sculptures d’Arnolfo di Cambio. Ce sculpteur et architecte, né à Colle di Val d’Elsa en 1245 et mort à Florence en 1302/1310, est l’un des représentants les plus ingénieux du gothique italien. Élève de Nicola Pisano, Arnolfo di Cambio part travailler à Rome à partir de 1270, pour la cour de Charles d’Anjou, pour lequel il réalise des portraits sculptés, mais aussi de nombreux grands chantiers comme le Mausolée du cardinal de Braye, les deux ciboires de la Basilique Saint-Paul hors-les-Murs ou encore le Monument funèbre pour Boniface VIII. Lors de son arrivée à Florence, dans les dernières années du XIIIe siècle, il entreprend la construction de la façade de la nouvelle cathédrale Santa Maria del Fiore. Il réalise alors une décoration statuaire impressionnante, dédiée à la Vierge, que l’on peut admirer aujourd’hui au Musée dell’Opera del Duomo.
Le programme iconographique de la façade comprenait plusieurs groupes sculptés retraçant les étapes de la vie de Marie. On retrouve ainsi, dans les trois tympans : la Vierge de la Nativité (1296-1300), la Majesté (1300-1305), aussi connue sous le nom de la Vierge aux yeux de verre, et enfin une Dormitio Virginis (1300-1310). Sont ajoutés à ces trois groupes, les figures de Sainte Réparate, de Saint Zénobe, d’anges, d’apôtres, de prophètes etc.. Le style des figures d’Arnolfo di Cambio pour la façade de la cathédrale est parfois empreint d’un classicisme précoce, principalement visible dans les drapés des statues (ex. Sainte Réparate).
Cependant, le projet de la façade gothique pour la cathédrale ne dépasse pas les portails puisqu’il fut interrompu en 1587 par François Ier, puis démantelé afin d’être remplacé par une façade de style renaissant.
Les statues de la façade gothique réalisée par Arnolfo di Cambio possèdent une grande importance à la fois historique et artistique. Si certaines de ces figures font preuve d’une grande innovation, comme les drapés presque classicisant de Sainte Réparate ou encore les évocations gréco-romaines dans La Vierge aux yeux de verre, d’autres soulignent la maîtrise du style gothique du sculpteur, visible notamment dans le réalisme de Saint Zénobe comparable aux oeuvres de Giotto.
L’oeuvre que nous présentons ici possède quelques similarités avec la production d’Arnolfo di Cambio, cependant ses similitudes ne sont pas assez développées pour émettre une paternité avérée avec le sculpteur. La statuette se rapproche alors davantage des ouvrages des suiveurs de di Cambio, décorateurs de la façade de la cathédrale Santa Maria del Fiore.
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