Cette splendide sculpture d’un Christ en croix datant de la toute fin du XVe siècle est d’une finesse rare. Cette représentation est un topos commun pendant la Renaissance et de nombreux artistes s’y sont essayés. Nous allons exposer le travail de quelques-uns qui nous on permit de mieux comprendre les influences des diverses représentations, et qui, par la suite nous permettent d’affirmer que cette oeuvre est issue d’un atelier florentin.
Ces Christs, sont pour la plupart en bois ou en bronze et nous pouvons en retrouver à travers toute l’Europe. La première révolution débute avec la peinture du crucifix de Giotto qui permet de sortir de la tradition byzantine. Puis Brunelleschi en fait une version en sculpture, l’historien Luciano Bellosi retiendra de cette oeuvre que c’est la première oeuvre de style Renaissance dans l’histoire de l’art.
Pisano a fait une version en bois où il penche la tête sur le côté mais le périzonium du Christ est plus long que celui de Brunelleschi qui avait décidé de représenter le Christ nu afin de rajouter pardessus un périzonium en tissu.
Quant à Donatello, il a fait deux versions très différentes du Christ, la première est en bois mais d’inspiration MoyenÂgeuse, son périzonium en bois est très long et il recouvre un genou, laissant l’autre apparent dans une sorte de mouvement vers l’avant. Tandis que sa deuxième sculpture est en bronze, faite pour orner la cathédrale de St Antoine de Padoue et cette fois-ci le Christ est musclé, les proportions de son corps ne sont pas les mêmes et sont plus réaliste que sa sculpture en bois. Son périzonium en bronze est très court, nous pouvons donc voir que les tendances sculpturales évoluent rapidement.
Dans le dernier quart du XVe siècle, certains grands ateliers familiaux d’Italie se sont spécialisés dans la création de crucifix. Les commandes étaient pour les églises mais aussi pour des lieux de cultes privés. Cela avait principalement lieu à Florence et dans les alentours. Parmi ces familles, nous pouvons citer les Del Tasso (Fransceco et Leonardo), les Sangallos (Giuliano, Antonio il Vecchio et Francesco) ainsi que les frères Giuilano et Benedetto da Maiano.
Michel-Ange, a fait un crucifix présent au musée du Bargello à Florence. Cet artiste tout comme Donatello étaient les maîtres à penser de l’époque et donc les autres artistes se sont inspiré des oeuvres de ces derniers. C’est pour cela que nous pouvons remarquer de nombreuses similitudes avec notre oeuvre telles que le traitement de la musculature.
Un crocifisso qui ressemble au notre dans la forme générale du corps est celui fait par Benedetto da Maiano. Les deux ont leurs têtes quasiment alignées avec les bras, ils sont musclés tout en laissant apparaître des côtes à certains endroits. Leurs genoux sont légèrement courbés et leurs pieds sont l’un sur l’autre à chaque fois. La grande différence réside dans le fait que Benedetto da Maiano a fait son Christ nu de manière à pouvoir lui ajouter un périzonium en tissu par dessus.
Giuliano da Sangallo, artiste florentin, s’est aussi adonné à l’art des crucifissi. Son plus célèbre est visible à la villa Quiete, qui se situe près de Florence. Ce qui est remarquable dans cette oeuvre est le traitement du corps qui est très réaliste, nous pouvons voir les tendons ainsi que les muscles et les côtes au niveau du torse, des aisselles mais aussi sur les tibias. Il est en bois mais son périzonium est en tissu et ses cheveux ondulés sont ajourés.
Concernant notre oeuvre, la polychromie est d’origine, il est assez grand et les proportions ainsi que la musculature sont plutôt réaliste. La sculpture est en rond de bosse et toutes les faces sont taillées, volonté de l’artiste qui aurait pu prendre le parti de ne pas sculpter l’arrière car son dos contre une croix n’est pas visible, ce qui démontre bien la virtuosité de ce dernier.
Il est composé de trois parties : son corps et chacun des bras, mais pour autant, ses bras ne sont pas articulés, comme certains modèles.
Son périzonium est en bois, d’un côté le drapé est rectiligne, tradition et esthétisme correspondant à la période médiévale tandis que de l’autre côté, il semble flotter quelque peu dans un mouvement typique de la Renaissance.
Sa tête, baissée et tournée vers sa droite est quasiment alignée avec ses bras. Il ne semble pas se déhancher, ou se tordre de douleur, cependant un léger contrapposto est visible du fait de la posture de ses genoux. Ses cheveux sont très travaillés et ajourés, ils sont séparés en mèches bouclées qui permettent notamment de laisser apparaître ses oreilles. Fait assez rare, car la plupart du temps, les artistes ne laissent pas apparaître les oreilles de leurs Christ. Pour autant, celle de gauche est finement taillée tandis que celle de droite n’est composée que de la forme générale sans être creusée. Sa barbe, symbole de sagesse, est séparée en deux parties, Leonardo del Tasso, sculpteur de la fin du XVe siècle à Florence, façonnait les barbes de ses Christs de la même manière.
Ses yeux sont entrouverts et sa bouche est fermée, preuve qu’il vient d’expirer son dernier souffle. Le nez fin, contribue à accentuer ses paupières très creusées. Il porte les stigmates de la couronne d’épines, que nous pouvons voir à travers les saignements sur son front.
Ses mains sont d’une grâce rare, ses doigts sont longs et légèrement crispés et ses ongles sont d’une finesse exceptionnelle. La peau autour de ses ongles recouvre ces derniers donnant un réalisme impressionnant. Le même phénomène est visible sur ses pieds, en effet la peau recouvre par un pli l’endroit où devait se trouver le clou, l’artiste a fait attention aux moindres détails de son oeuvre afin de la rendre la plus réaliste possible.
Concernant son corps, son dos, ses bras ainsi que son torse sont légèrement musclés, mais ses côtes restent visibles notamment à l’arrière de celui-ci, afin de reproduire la tension du corps lors de la crucifixion. Ses jambes sont courbées vers l’avant et ses pieds sont collés l’un sur l’autre.
Il existe trois types de représentations du Christ :
-Les Christus triumphans que nous pouvons retrouver dès le Ve siècle.
-Les Christus patiens qui apparaissent au Xe siècle.
-Les Christus dolens dont le nôtre fait partie et qui apparaissent à la Renaissance, la figure du Christ y est représentée les yeux fermés, la tête reposant sur son épaule et les blessures encore visibles comme la plaie sur le flanc droit provoquée par le coup de lance du centurion romain.
Nous pouvons ressentir le mouvement humanisme à travers cette sculpture qui place l’Homme et ses valeurs au centre de la pensée, l’Homme est au-dessus du divin.
Avec tous ces exemples d’oeuvres similaires, nous comprenons que l’artiste qui a fait notre oeuvre devait vivre en Toscane et a dû fréquenter les ateliers de ces divers artistes pour s’en inspirer afin de créer son chef d’oeuvre.
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